Léa, le 02 octobre 2024

par La forteresse cachée
Tags : Entretien
Troisème entretien avec Léa

LFC : Bonjour, comment vas-tu ? Ça fait quelque temps depuis la dernière fois qu’on s’est parlé, est-ce que tu peux nous donner des nouvelles sur votre quotidien en ce moment ?

Léa : On est dans des galères très basiques. Il n’y a plus de bateaux, plus d’avions, plus de produits frais, plus de carburant… C’est un peu le bordel, on est dans de la gestion du quotidien.

À Ouvéa, la situation est compliquée parce que tout est désorganisé. Normalement, il y a deux compagnies maritimes1 qui amènent des marchandises, mais, depuis quelques mois, il n’y en a plus qu’une. La deuxième a eu un problème financier et elle a coulé. Du coup on est dépendant·es d’un seul bateau, mais la semaine dernière, il y a eu un décès à la Compagnie Maritime des Îles, un employé est tombé avec son charriot élévateur et il est mort. Ça a mis la compagnie à l’arrêt et stoppé les livraisons de marchandises sur l’île. Depuis les évènements, on n’a plus beaucoup d’avions non plus. Régulièrement, il y en a qui sont annulés et on passe souvent plusieurs jours sans vols. On ne peut plus envoyer ou recevoir de colis par avion parce qu’ils en ont déjà des tonnes de bloquées. Plein de gens essaient d’envoyer des trucs et ça reste bloqué. C’est vraiment une année où on attend, où tout est bloqué, un peu comme dans une année Covid.

Du coup, là, il n’y a plus grand-chose sur l’île. On a de quoi vivre, mais il y a des trucs de base qui manquent comme de la farine. Il faut qu’on apprenne à faire de la farine de manioc, à être plus autosuffisants. Il nous reste quand même la pêche et de quoi manger.

À Ouvéa, les gens ont le sentiment, et ils ont des raisons de l’avoir, d’être toujours abandonnés, qu’on essaye de les dépouiller. Ce matin, par exemple, il y a eu une manifestation, parce que plusieurs usines ferment. L’usine de la poissonnerie ferme. Toute la filière vanille ferme. La maison de la vanille qui achetait la vanille au producteur ferme. L’usine de coprah va peut-être fermer aussi. Le coprah c’est fait avec la noix de coco, c’est pour faire de l’huile. Tu ouvres, tu décortiques, tu fais chauffer la noix de coco. Après tu amènes à l’usine, ils ont une sorte de presse et ça fait de l’huile. La manifestation, elle, pointait une mauvaise gestion de la part de la Province des Îles qui, normalement, est censée dynamiser l’économie et gérer ces structures-là. Mais, la Province des îles est spécialement corrompue. Les premiers trucs impactés, c’est la culture, l’environnement, des trucs comme ça. Il y a des investissements dans certains secteurs au détriment d’autres. Comme dans des hôtels 5 étoiles à Lifou, çaa a créé de l’incompréhension et de la colère. La manifestation de ce matin, c’était le signe d’un ras de bol général. Il y avait les pêcheurs, les coprah-culteurs, les producteurs de vanille. Tous les gens qui sont dans ces filières sont venus manifester2.

LFC : Est-ce que, suite aux événements et aux difficultés d’approvisionnement à Ouvéa, tu penses que les gens se sont tournés vers une économie vivrière ?

Léa : Je ne sais pas si les évènements ont accentué l’aspect circulaire de l’économie d’ici parce que les produits circulaient déjà beaucoup entre nous. Moi, j’ai jamais acheté un poisson à Ouvéa et pourtant, je mange du poisson, mais je ne pêche pas vraiment. Je pense qu’il y a des gens qui ont refait des champs ou qui les ont plus travaillés que d’habitude. Il y a notamment des gens qui travaillaient à Nouméa et qui, depuis les évènements, sont revenus vivre ici. Soit parce qu’ils avaient perdu leur boulot, soit parce qu’ils n’avaient pas le choix, mais aussi en se disant que leur mode de vie à Nouméa n’avait pas de sens3. Ils sont revenus ici, ils ont refait les champs et ont repris un mode de vie autosuffisant.

Il faut aussi dire que ça ressemble un peu aux bonnes résolutions prises pendant le Covid lorsqu’il y a eu la pénurie, sauf qu’après ça, les gens sont retournés au magasin. Les mauvaises habitudes restent quand même bien ancrées. Je ne pense pas que le retour à la terre soit politisé par une majorité de personnes, mais plus il y aura de crises, plus ça va se mettre en place. En fait, le «mode survie» que je te décris c’est à comprendre au niveau du pays, mais, dans nos quotidiens, on a l’habitude de faire face à certaines choses. J’aime pas trop ce mot mais on pe,ut parler d’une forme de résilience.

LFC : Depuis la métropole, la presse parle beaucoup de Saint-Louis4, les gens de là-bas seraient des tueurs de flics5… Et maintenant que la France a lâché sur la question du dégel, il faut faire le ménage là bas.

Léa : Saint-Louis, c’est la bête noire. C’est clair et net et les gens sont vraiment isolés. Il y a une route et après c’est les montagnes. La route est bloquée, il doit y avoir de la nourriture qui doit passer, mais pas assez pour toute la tribu. Hier, il y a 6 personnes qui se sont rendues. Je ne sais pas trop ce qu’il se passe. Ça à l’air d’être les coutumiers de Saint-Louis qui les auraient encouragés à se rendre6. J’avoue qu’on n’arrive pas trop à savoir, mais le commissariat était très content.

LFC : Comment ça se passe à Nouméa ?

Léa : À Nouméa, peu de choses ont changé depuis le mois de septembre. Il y a toujours le couvre-feu. Au niveau de l’économie, les hôtels sont complets depuis que les militaires sont arrivés et les ont réquisitionnés, mais ça ne compense pas l’absence des touristes7. C’est le statu quo. Il y a des barricades et des militaires partout. Tout le monde est un peu à se regarder, à attendre. L’occupation est différente d’un endroit à l’autre, tu les croises de loin dans certains quartiers, ils se mélangent à la population des quartiers sud. Enfin, ils ne sont pas partis… Et tu as vu le canard enchaîné8 ? C’est n’importe quoi… Et… je pense que tout le monde le savait. C’est pour ça, les annonces c’est joli, mais après on verra ce qu’il se passe…

LFC : Et au niveau de l’actualité politique, on en est où ? Il y a eu du mouvement dans les négociations ?

Léa : Il y a quand même une bonne nouvelle : la réforme ne passera pas. Enfin, pour l’instant. Hier, Barnier a annoncé l’abandon de la loi sur le dégel du corps électoral et le report des élections provinciales9. Concernant le report des élections, tout le monde est d’accord pour dire que c’est trop le bordel pour les faire maintenant. De toute façon, il n’y a vraiment plus grand-chose qui fonctionne. Les gens ne sont pas dans les élections, du tout. Ils sont méfiants sur le pourquoi et attendent. Au sujet du dégel, on n’est pas sûrs que ce soit un abandon total… On va voir ce qui va se passer. Mais pour l’instant, le dialogue est vraiment au point mort.

Enfin, il y a la délégation10 qui est à Paris, avec Emmanuel Djibaou qui est un peu au centre de l’échiquier, mais c’est une composition élargie, il y a juste les plus extrêmes qui ne sont pas dans cette délégation. Et du côté des loyalistes, il y a Nicolas Metzdorf11 qui est tout seul à Paris12, il ne participe pas aux discussions avec la délégation13, il fait ses réunions tout seul…

Il faudra voir leur stratégie ensuite… Macron est censé annoncer la reprise des négociations pour le mois de novembre. Ce sera plus facile de comprendre la stratégie et les enjeux une fois que la délégation reviendra. Enfin, l’enjeu principal de ces négociations c’est l’argent pour la reconstruction du pays14. Pour l’instant, la situation économique est assez folle.Pour le moment, on n’a pas eu d’annonce au sujet du rapatriement des robocops alors, est-ce qu’ils vont rester sur une stratégie ultra-sécuritaire et continuer à mettre la pression… J’espère qu’ils ne vont pas rester jusqu’en décembre 202515.

Est-ce qu’ils vont quand même essayer de renégocier le corps électoral ? Est-ce qu’ils vont essayer de renégocier avec tout le monde pour trouver une sorte d’entre-deux ou pas ? Est-ce qu’ils vont essayer de faire autrement ?16 En tout cas, ils ont vu que le passage en force ne marchait pas. Déjà c’est bien que ça soit géré à nouveau directement par, Matignon, parce que le fait que ce soit géré par le ministère de l’intérieur, ça n’avait pas de logique, le message étaitIultra-répressif17.

LFC : Comment ce sont passées les élections du Congrès18 de cet été ?

Léa : Cet été, Roch Wamytan a perdu les élections au Congrès. En gros, il y a toujours les deux blocs, indépendantiste et loyaliste, avec à peu près le même nombre de personnes des deux côtés. Et à chaque fois, ceux qui font basculer d’un côté ou de l’autre, c’est les faiseurs de rois, un tout petit parti qui s’appelle l’éveil océanien19. Ce sont des migrants de Wallis et Futuna20. À chaque fois ils s’allient soit avec les uns, soit avec les autres. Historiquement, ils ne sont pas pour l’indépendance, en tout cas à la base. Mais ils ont quand même la culture océanienne en commun avec les indépendantistes. Dernièrement, ils étaient toujours avec les indépendantistes. Et cette fois-ci, il y a eu des négociations, ils se sont alliés avec les non-indépendantistes et c’est une représentante de l’Éveil Océanien qui a été élue au congrès21. Je pense qu’ils sont plutôt pour un «oui à l’indépendance, mais pas maintenant»22. Ce qui ne veut pas dire grand-chose. Mais voilà, c’est un parti réformiste de base et leurs électeurs ne sont pas spécialement pour l’indépendance, ils sont venus là pour la France, pour être français.


  1. La Compagnie Maritime des Îles et la Société du Transports des Îles. ↩︎

  2. La manifestation pointait la mauvaise gestion et le manque de transparence de la province des îles. Au même moment de l’annonce de la liquidation de la poissonnerie, de gros investissements ont été fait par la SODIL (Société de développement et d’investissement des Îles en Nouvelle-Calédonie) pour la relance du tourisme. ↩︎

  3. Selon l’Institut de la statistiques et des études économiques, 11 600 personnes ont perdu leur emploi entre mars 2024 et décembre 2024 et ce uniquement dans le secteur privé. Cela peut expliquer en partie ce mouvement même si l’économie du pays n’était pas non plus au sommet avant les émeutes. ↩︎

  4. La tribu de Saint Louis est situé sur la commune de Mont-Dore, à moins de 20 kilomètres de Nouméa. Elle est composée d’environ 1500 personnes. C’est un fief de l’indépendantisme kanak. Son grand chef est l’ancien président du Congrès, Roch Wamitan. Descendant d’une grande famille indépendantiste. ↩︎

  5. Les médias décrivent Saint-Louis comme un lieu avec beaucoup de violences et d’affrontements, certains épisodes comme celui de la chasse au walisien ont rendu la tribu célèbre. <https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/03/12/saint-louis-une-histoire-caledonienne-le-visage-contraste-d-une-tribu-kanak_5269310_1655027.html ↩︎

  6. Les évènements qui se sont déroulés à Saint-Louis au cours du mois de septembre, et des mois qui ont précédés, ont cristallisé l’attention médiatique. En effet, depuis le début des émeutes, la route unique qui traverse Saint-Louis a été bloquée de nombreuses fois par la gendarmerie. C’est dans le cadre du blocage de la route que 6 personnes recherchées se sont rendues entre septembre et octobre 2024. Elles sont accusées de car-jacking, destruction de biens et tentative de meurtre contre des policiers. Le procureur chargé de l’affaire a souligné le rôle des coutumiers et leur coopération pour pousser les personnes recherchées à se rendre. La route a ensuite été réouverte. Puis refermée moins de 24 heures plus tard suite à un vol de voiture avec violence. <https://la1ere.francetvinfo.fr/nouvellecaledonie/province-sud/mont-dore/la-traversee-de-saint-louis-rouverte-dans-des-conditions-maximales-de-securite-assure-le-general-nicolas-mattheos-1527152.html ↩︎

  7. Le tourisme est le deuxième pilier de l’économie du pays après l’extraction du Nickel. Durant les mois qui ont suivi les émeutes, le pays n’a pas accueilli de touristes. Des croisières ont recommencé à faire escale en Nouvelle Calédonie, notamment à Lifou à partir de novembre 2024. ↩︎

  8. Plusieurs dizaines de CRS, Issus de trois compagnies différentes déployées en Nouvelle-Calédonie depuis les émeutes de mai, ont été rapatriés en toute discrétion en métropole. Ils avaient la gonorrhée (ou chaude-pisse), contractée suite à des rapports sexuels non protégés dans «la boite de nuit la plus hot du Caillou».

    <https://www.lindependant.fr/2024/09/12/une-dizaine-de-crs-discretement-rapatries-pour-avoir-contracte-une-ist-dans-une-boite-de-nuit-hot-la-direction-refute-les-accusations-12192912.php ↩︎

  9. En Nouvelle-Calédonie, l’élection provinciale permet d’élire les membres des Assemblées de Provinces et du Congrès. ↩︎

  10. En septembre 2024, une délégation a été dépêchée en métropole pour négocier le budget alloué à la Nouvelle-Calédonie en vue de la reconstruction du pays après les émeutes débuté en mai 2024. Cette délégation est composée de représentants des 6 forces politiques de Nouvelle Calédonie représentées au sein du congrès. Elle s’est rendue à Paris le 23 septembre pour y défendre un plan quinquennal 2024-2029, programme d’investissements chiffré à 500 milliards de francs sur cinq ans, doit notamment permettre d’éviter des émeutes de la faim, avertissait Philippe Gomès (Calédonie ensemble), début août. La rupture prochaine des aides, en particulier celles liées au chômage partiel, fait craindre un tel scénario d’ici la fin de l’année. La situation sur place est en effet dramatique, avec 24 000 personnes au chômage, soit 35% du secteur privé, alertait Olivier Faure. À la fin de leurs droits, ce sont des familles entières qui sombreront dans la pauvreté. ↩︎

  11. Nicolas Metzdorf, habitué de CNews et Sud Radio, né en 1988, est le fils de Claude Metzdorf, éleveur bovin et chef de la section du RPCR à Poya, condamné pour homicide pour avoir tué un braconnier sur ses terres en 2001. Nicolas Metzdorf était rapporteur du projet de loi constitutionnelle réformant le corps électoral calédonien pour les élections provinciales, projet qui a déclenché l’insurrection indépendantiste du 13 mai 2024. Il «ne [se] sens pas du tout responsable» et «ce n’est pas le vote du projet de loi qui a provoqué les émeutes. Les indépendantistes auraient trouvé autre chose de toute façon parce que leur but est de déstabiliser, et de faire partir suffisamment de monde pour gagner un référendum dans cinq ans». Le 16 septembre, à l’issue d’une rencontre avec l’ambassadeur d’Israël à Paris, il explique : «Le point commun entre les Israéliens et les Calédoniens ? Être traités de colons alors qu’ils sont chez eux depuis plusieurs générations.».

    À la suite de la déclaration unilatérale de souveraineté des chefferies sur leurs territoires, proclamée par Inaat Ne Kanaky, le 24 septembre 2024, plusieurs individus appartenant au clan Weko ont remis le 19 octobre à la gendarmerie de Poya un document intitulé acte légitime de proclamation de pleine souveraineté clanique, mythique et totémique à l’encontre de messieurs Claude Metzdorf et Nicolas Metzdorf pour occupation sans droits ni titres de leurs propriétés à Poya. Une revendication foncière qui prenait effet au 11 novembre 2024. Sept personnes ont été convoquées devant le tribunal correctionnel le 24 avril 2025 et placées sous contrôle judiciaire. ↩︎

  12. Le groupe Les Loyalistes au Congrès a annoncé qu’aucun de ses élus ne sera du voyage pour négocier avec les représentants de l’État le plan de reconstruction et d’accompagnement 2024-2029. Les conditions ne seraient pas réunies, juge sa présidente, Françoise Suve. Le parti de Jean-Pierre Djaïwé n’a jamais caché ses réserves concernant ce plan imaginé par Calédonie ensemble, lui préférant celui du gouvernement (S2R). «Nous pensons que la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie ne peut se réaliser sans les composantes politiques calédoniennes qui défendent une voie pacifique et constructive pour sortir de la situation de crise que traverse le pays.», dit Françoise Suve. Une des raisons est l’absence du Palika aux négociations, l’autre étant l’absence d’un gouvernement pleinement constitué à Paris. https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/10/02/nouvelle-caledonie-le-depute-macroniste-nicolas-metzdorf-developpe-sa-vision-de-droite_6341703_823448.html ↩︎

  13. Nicolas Metzdorf a été reçu par le président du Sénat, le ministre de l’économie, celui des outre-mers, celui de l’intérieur et a déjeuné à l’Elysée avec Emmanuel Macron le 1^er^ octobre. Alors que les loyalistes sont en crise, leur base de mobilisation se réduisant d’année en année, il a tenté de défendre le projet de loi sur le dégel du corps électoral. Le 2 octobre 2024, il était reçu, avec Sonia Backès, par Laurent Saint-Martin, chargé du budget et des comptes publics qui leur a fait part de perspectives très rassurantes pour la reconstruction de l’économie calédonienne promettant une enveloppe de 59 milliards de francs (500 millions d’euros). ↩︎

  14. Le 15 novembre 2024, le président du 17e gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Louis Mapou se rend à Paris avec une délégation pour convaincre l’exécutif national de la bonne direction prise par le plan de sauvegarde, de refondation et de reconstruction (PS2R). Ce plan est une réponse politique aux émeutes déclenchés le 13 mai. Pour assurer une adhésion large à ce plan, le gouvernement avait invité l’ensemble des acteurs concernés à soumettre leurs contributions et a organisé une consultation numérique auprès de la société civile en août et en septembre 2024. 3000 réponses ont été recueillies, dont plus de 90% issus de la Province Sud, la province la plus riche et la plus développée de la Nouvelle-Calédonie et dont la vie politique a toujours été largement dominée par les loyalistes.

    Selon le Monde, le PS2R a comme but de sauver un système économique qui a vu près du quart du PIB néo-calédonien s’évaporer depuis le 13 mai. Il repose sur quatre grands piliers : attractivité de l’économie, viabilité de la protection sociale, efficacité des institutions et restauration du vivre-ensemble. (Le Monde, 16.11.24) ↩︎

  15. Au déclenchement des émeutes, 1 700 policiers et gendarmes étaient présents dans les îles calédoniennes. En une semaine l’État en a envoyé un milliers supplémentaires, comprenant plus de 200 membres du GIGN, des gendarmes mobiles et des CRS. Fin mai 2024 et au fur et à mesure des renforts de gendarmerie mobile, de GIGN, mais aussi de police judiciaire, plus de 3500 policiers et gendarmes étaient en Nouvelle-Calédonie. S’y ajoutent les 600 militaires du RIMaP-NC (régiment d’infanterie de marine du Pacifique-Nouvelle-Calédonie) affectés à des missions de sécurisation des aéroports, évacuation des touristes et appui des forces de l’ordre.

    <https://www.huffingtonpost.fr/france/article/emeutes-en-nouvelle-caledonie-armee-renforts-policiers-a-quoi-ressemble-le-dispositif-deploye_234005.html <https://lessor.org/operationnel/renforts-de-gendarmes-en-nouvelle-caledonie-et-levee-de-letat-durgence/ ↩︎

  16. Les présidents de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et du Sénat Gérard Larcher se sont rendus en Nouvelle-Calédonie du 10 au 14 novembre 2024 pour une mission de «concertation et de dialogue». En février 2025 et après de nombreux échanges entre l’État et les délégations s’entame une nouvelle phase de discussion entre Manuel Valls, alors ministre des outre-mers et les délégations indépendantistes et non-indépendantistes. Après plusieurs jours de discussions bilatérales entre le ministre d’outre-mers et les forces politiques de Nouvelle Calédonie, Manuel Valls a déclaré que «Il ne peut pas y avoir de relèvement économique sans un compromis politique, tout comme il ne peut pas y avoir de solution politique durable sans relèvement économique.» Autrement dit, 4 mois après cet entretien, les perspectives ne sont toujours pas claires et les discussions en sont toujours au stade de négociations. En effet, les positions entre indépendantistes et non-indépendantistes semblent toujours irréconciliables, d’un côté, Sonia Backès œuvre pour l’application d’un fédéralisme interne et de l’autre, Emmanuel Tjibaou milite pour la pleine souveraineté de la Kanaky. <https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/11/09/c-est-le-moment-de-dire-que-la-nouvelle-caledonie-a-un-avenir-qui-peut-etre-partage_6384636_823448.html ↩︎

  17. Il s’agit d’une victoire du mouvement indépendantiste ayant aboutit aux accords de Matignon et Nouméa, que les négociations soient conduites avec le premier ministre et non avec le ministre de l’intérieur, faisant de la question de l’indépendance une question politique et non pas une question de maintien de l’ordre. Il semble cependant que depuis quelques mois et l’annonce du retrait par Michel Barnier de la loi sur le dégel, que l’État ait bel et bien décidé de confirmer son choix de considérer la gestion de la question indépendantiste comme une question interne puisque c’est Manuel Valls, ministre des outre-mers qui fait les allers-retours. Quelques jours avant le soulèvement de mai 2024, Manuel Valls, Jean-Marc Ayrault et Edouard Philippe, tous trois anciens premiers ministres plaidaient par ailleurs pour une reprise en main du dossier par Matignon, flairant une crise profonde alors que le vote de la loi sur le dégel approchait. C’est Emmanuel Macron qui avait pris la décision de confier les négociations d’abord à Sebastien Lecornu, ministre des Outre-Mers, puis à Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Ce dernier s’était empressé de nouer des liens avec les loyalistes et notamment Sonia Backès, son ancienne secrétaire d’État. ↩︎

  18. Le Congrès est la première institution de la Nouvelle Calédonie, établi en 1999. Elle a pour but de voter le budget de la Nouvelle-Calédonie. Cette institution est née suite aux accords de Nouméa signé en 1998. ces accords visent la reconnaissance de l’identité kanak, un transfert de compétence à la Nouvelle Calédonie. <https://www.congres.nc/lassemblee/ ↩︎

  19. Le parti politique l’éveil océanien a été crée en 2019. Il est composé de personnes originaires des Îles Wallis et Futuna, qui constitue plus de 8 % de l’ensemble de la population de Nouvelle-Calédonie. Ce parti est largement perçu comme pivot entre les loyalistes et les indépendantistes. ↩︎

  20. Les îles de Wallis et Futuna sont une collectivité d’Outre-Mer française situées au large de l’Océanie. Elles se situent à 1900 kilomètres de la Nouvelle-Calédonie/ Kanaky. <https://www.repository.usp.ac.fj/id/eprint/8515/1/DominiquePechberty.pdf ↩︎

  21. Cette représentante est Veylma Falaeo, nouvelle présidente du congrès de Nouvelle Calédonie. Elle a été élue fin août 2024, à la succession de Roch Wamytan, chef coutumier kanak, indépendantiste membre du groupe FLNKS - Union Calédonienne, qui était en place depuis 2011. Pour la première fois, l’éveil océanien a proposé sa propre candidature plutôt que de soutenir les indépendantistes. Au second tour, les non-indépendantistes ont retiré leur candidature à son profit. ↩︎

  22. Elue grâce au retrait des non-indépendantistes au second tour, elle déclarait peu après à Manuel Valls, ministre des outre-mers : «Nous avons défendu dès le troisième référendum une vision du non pas maintenant pour un oui partagé plus tard». ↩︎